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86 Andrea Caracausi, Corine Maitte
du travail imposé à leurs membres la centralité et la rationalisation de
celui-ci, les institutions catholiques auraient été affligées en la matière
d’une inefficacité chronique et persistante . C’est ce postulat, peu dis-
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cuté, que nous avons voulu mettre en question, en éclairant la situa-
tion italienne de comparaisons avec les hospices des pauvres du
monde hispanique (Madrid-Agua de la Roza; Mexico-Rossi). Nous
avons également choisi d’étudier ce thème dans la longue durée, car il
nous semble que les discontinuités souvent implicites liées à la parti-
tion du travail des historiens, celles entre Renaissance et époque post-
tridentine, par exemple, ou entre Ancien Régime et époque contempo-
raine, doivent être discutées, si ce n’est remises en question. Une at-
tention particulière a été portée à la séquence XVII -XVIII siècle, lors-
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que de grands projets d’enfermement des pauvres se développent un
peu partout, repris et reformulés dans un langage différent par les
autorités étatiques éclairées du XVIII siècle. Enfin, nous avons sou-
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haité encourager des études sur une ou plusieurs institutions carita-
tives plutôt que des approches macro sur des régions et des États en-
tiers. L'objectif est en effet de partir d'études de cas approfondies afin
de permettre des comparaisons fructueuses.
Bien sûr, tout un courant historiographique a insisté sur la norma-
lisation des comportements que ces institutions engendraient ou du
moins cherchaient à inculquer aux pauvres. Il ne s’agit cependant pas
ici de reprendre à notre compte les propos parfois simplifiés de Marx ou
de Foucault sur « l’armée de réserve » ou la « disciplinarisation des
pauvres » . Nous ne croyons pas que les processus obéissent à des
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motifs simples et univoques. Il faut également questionner la façon
dont le travail proposé par certaines de ces institutions s’ajoutait –ou
non– aux possibilités offertes localement par les entrepreneurs privés,
par les corporations et dont les individus se sont appropriés ces
8 Sur les institutions protestantes, la bibliographie est surabondante, notamment du
côté anglais : voir notamment F. Driver, Power and Pauperism, Cambridge University
Press, Cambridge, 2004; J. Carré, La prison des pauvres. L’expérience des workhouses en
Angleterre, Vendémiaire, Paris, 2016; P. Higginbotham, Workhouses of the North,
Stroud, The History Press, 2006; R. Schalk, From Orphan to Artisan: Apprenticeship Ca-
reers and Contract Enforcement in The Netherlands before and after the Guild Abolition,
«The Economic History Review», 70, (2017), 3, pp. 730-757; Elise van Nederveen
Meerkerk, Ariadne Schmidt, Between Wage Labor and Vocation: Child Labor in Dutch
Urban Industry, 1600-1800, «Journal of Social History», 41 (2008), pp. 717-736. D. Lom-
bardi, par exemple, soutient, à propos des institutions pieuses de Florence, qu’elles
n’auraient pas institué une assistance aux pauvres basée sur l’éthique du travail, mais
plutôt sur la mortification, la pénitence et la confession cf. D. Lombardi, L’ospedale dei
mendicanti nella Firenze del Seicento. ‘Da inutile serraglio dei mendici a conservatorio e
casa di forza per le donne’ », «Società e storia», 24, (1984), pp. 290-311, ici p. 301.
9 K. Marx, Il capitale : critica dell'economia politica, Rinascita, Roma, 1951; M. Fou-
cault, Surveiller et punir : naissance de la prison, Gallimard, Paris, 1975.
Mediterranea - ricerche storiche - Anno XVII - Aprile 2020
ISSN 1824-3010 (stampa) ISSN 1828-230X (online)