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Les institutions charitables comme lieux de travail, XVI -XX siecle 89
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exemple, avait insisté sur sa prolifération dans les conservatori ro-
mains du XVIII siècle .
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Partant de cela, nous avons adressé aux contributeurs un ensemble
de questions. Le premier ensemble tourne autour des travailleurs, des
formes de leur organisation et des relations de travail au sein de ces
institutions. Comment la « force de travail » est-elle recrutée ? On sait
en effet que, souvent des travailleurs dont les statuts sont fort différents
se côtoient au sein d’une même institution : sans même parler des em-
ployés directs de celle-ci, on peut trouver côte à côte des maîtres et des
maîtresses salariés pour enseigner et diriger les travaux de pauvres ar-
rêtés pour vagabondage, mauvaise vie, délinquance, prostitution etc.,
des orphelins abandonnés qui n’ont d’autre famille et d’autre recours
que l’institution qui les prend en charge, d’autres enfants qui ont encore
des parents et dont le passage peut être limité au temps d’une crise
économique ou familiale, des pauvres qui s’enrôlent volontairement en
espérant trouver secours, travail, voire formation, dans ces institu-
tions... Sous une appellation générique « d’orphelins » ou de « pauvres »
se cachent donc en fait des situations sociales et familiales bien diffé-
rentes. Ainsi le Ritiro di S. Gio di Dio, dit delle Rosine, fondé à Turin en
1755, doit accueillir à la fois des jeunes envoyés par l’orphelinat San
Giovanni, d’autres placés par leur famille –selon des processus peu con-
nus–, d’autres encore employés volontaires, à côté de ceux arrêtés par
la police. C’est une situation que l’on retrouve dans la plupart des ins-
titutions étudiées ici.
Ce côtoiement d’acteurs aux statuts très différents conduit-il à une
indistinction massive qui relativise les différences ou, au contraire, les
types de travaux, voire les lieux et les conditions de travail, sont-elles
différenciés ? Dans un article consacré en 2011 à l’Hôpital de la Cha-
rité de Lyon, Monica Martinat suggère l’importance des différencia-
tions internes entre les pensionnaires . Elle montre en effet que cette
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institution n’emploie pas de la même façon les garçons et les filles, ce
qui ne surprend pas et que l’on retrouve dans différents articles de ce
numéro (Caracausi, Maitte). Par exemple, dans les orphelinats de Pa-
doue (Caracausi), si les jeunes garçons et les jeunes filles peuvent les
uns comme les autres tricoter, seules certaines jeunes filles commen-
cent à travailler comme rubanières. Cette distinction sexuelle du tra-
vail est à l’œuvre sans doute de façon bien plus marquée à l’intérieur
15 A. Groppi, I conservatori della virtù: donne recluse nella Roma dei papi, Laterza,
Roma, 1994.
16 M. Martinat, Travail et apprentissage des femmes à Lyon au xviii e siècle, «Mélanges
de l’École française de Rome - Italie et Méditerranée modernes et contemporaines», 123
(2011), 1, pp. 11-24.
Mediterranea - ricerche storiche - Anno XVII - Aprile 2020
ISSN 1824-3010 (stampa) ISSN 1828-230X (online)