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                les pauvres mendiants dont les jésuites Chaurand et Guevarre sont
                d’actifs propagateurs, les milieux toscans, tout en louant leur œuvre,
                sont tout à fait conscients des problèmes financiers sur lesquels les
                tentatives précédentes ont jusque-là achoppé. La Congrégation, cons-
                tituée de 72 députés choisis parmi les nobles, les ecclésiastiques et les
                citadins, répartis par sestieri sous la responsabilité de l’archevêque, a
                clairement pour but de quadriller la cité et d’y développer un modèle
                réticulaire d’assistance. Son œuvre est triple : concéder des licences
                de mendicité à ceux qui ne peuvent faire autrement, preuve de la fail-
                lite de la tentative d’éradiquer totalement cette pratique  ; faire tra-
                                                                       87
                vailler un certain nombre de pauvres dans des ateliers qu’elle organise
                (tissus de laine et de coton pour lesquels elle obtient en 1702 un pri-
                vilège déjà rappelé, production de saie scotte et un troisième pour l’em-
                paillage des fiaschi, si caractéristiques de la Toscane) ; enfin, fournir
                du travail à domicile aux familles pauvres. Dès lors, la répartition du
                travail se fait par sestieri, par l’entremise des grands notables qui com-
                posent la congrégation.
                   Est-ce une réussite ? On peut en douter au vu du tumulte organisé
                par près de 500 femmes sous les fenêtres du Palais du grand-duc le
                6/8/1710 réclamant du « pain et travail ». Du travail comme elles l’en-
                tendent, si l’on en croit les plaintes de la Congrégation qui se lamente
                que les femmes pauvres refusent la filature de coton qu’elle leur pro-
                pose ‘parce que « filer le coton les oblige à rester fixes et les empêchent
                d’aller vaguant par la ville » . Néanmoins, comme ne manqueront pas
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                de le souligner plus tard les libéraux hostiles à toute politique d’assis-
                tance, celle-ci a fait germer l’idée qu’outre le pain, le travail aussi est
                un bien commun dont le souverain doit assurer la juste disposition
                par tous. Si les Jésuites sont alors chargés de prêcher le calme, la
                Congrégation San Giovanni Battista organise la répartition du travail
                par  quartier, tout  comme  Franci  s’agite  pour  obtenir  subsides  du
                grand-duc afin de développer certaines manufactures.
                   La Congrégation semble passer d’une logique d’assistance à une
                logique entrepreneuriale, régulièrement soutenue cependant par les
                subsides  gouvernementaux  ou  paragouvernementaux :  en  1709,  le
                legs du frère du grand-duc, Francesco Maria de Medici, permet sans
                doute un premier développement de l’activité, modeste si l’on en croit
                les révoltes de 1710, mais utile cependant à faire taire celles de 1711 .
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                   87  Les mendiants autorisés sont entre 700 et 800 au début du siècle cf. Asf, Con-
                gregazione di S. Giovanni Battista, I serie, 9, cité par L. Cajani, L’assistenza ai poveri
                nella Toscana settecentesca cit., note 9, p. 186-7.
                   88  ASCF, Congregazione di San Giovanni Battista, 9965, cit. D. Lombardi, Povertà
                maschile, povertà feminile…, cit., p. 175, nota 71.
                   89  L. Cajani, L’assistenza ai poveri nella Toscana settecentesca cit., p. 187.



                   Mediterranea - ricerche storiche - Anno XVII - Aprile 2020
                   ISSN 1824-3010 (stampa)  ISSN 1828-230X (online)
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