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Donner du travail aux pauvres : les logiques laborieuses dans les institutions... 105
Le lien de cette assistance de fondation privée avec le grand-duc est
particulièrement étroit puisqu’il approuve les règlements, nomme le
directeur de l’institution (après Franci, Carlo Gianni est nommé à sa
tête en 1688), donne de l’argent comptant, soit directement issu de
son trésor personnel, soit par des versements de la Depositeria, voire
en lui affectant les revenus du Lotto (en 1754 notamment). Surtout,
comme nous allons le voir, il concède des privilèges et des régies (ap-
palti) pour assurer à cette institution, comme à d’autres, des sources
de travail et de financement.
De fait, autour de Côme III gravite tout un ensemble de réformateurs
attentifs à ce qui se fait à l’étranger, particulièrement en France . L’in-
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fluence des Jésuites sur le souverain est grande et, sur suggestion de
Paolo Segneri, il convie Giovanni Maria Baldigiani à voyager en France,
pour y observer ce qui s’y fait . À peine rentré, celui-ci rédige des « con-
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seils pour un règlement des pauvres à Florence » , un ensemble de me-
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sures qui lie lutte contre la pauvreté et développement économique. Il y
conseille notamment la mise en place de nouvelles productions agricoles
et manufacturières ainsi que le développement d’innovations techniques
pour les plus anciennes. Il encourage les marchands à contenir leurs
profits pour mieux affronter les marchés étrangers : il incite également
les artisans à augmenter leurs heures de travail, notamment en travail-
lant « du matin au soir sans aucune pause et avec sollicitude, voire en
limitant les jours de fêtes » . La rhétorique est connue, ancienne, mais
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elle va aussi contribuer à organiser de façon renouvelée le travail dans et
hors les institutions de charité. À partir de 1700, Baldigiani va être l’un
des instigateurs de la Congrégation San Giovanni Battista sul soccorso ai
poveri, dernière grande institution fondée dans le très riche panorama
florentin, et dont l’un des buts principaux va également être de secourir
les pauvres par le labeur . Si le rapport au travail manuel est en effet
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fondamental pour toutes ces institutions, les formes, les contenus et les
30 Dans l’entourage d’Honoré Chaurand (Valensole, 1617- Avignon 1697 et à qui on
attribue la création de 126 Hôpitaux généraux, plus ou moins durables) et d’André Gue-
varre (1646-1726 auteur d’une Mendicité abolie, publiée pour la première fois à Aix-en-
Provence en 1668) qui viennent d’aillleurs en Toscane dans les années 1690.
31 Asf, Miscellanea Medicea, 366; voir F. Fineschi, La Quarconia cit., p. 11-23. Gio-
vanni Maria Baldigiani est aussi l’un des responsables de l’Ospizio Apostolico romain
jusque 1699 cf. F. Saccà, L’assistenza alle ragazze del conservatorio di S. Giovanni in
Laterano nel corso del XVIII secolo, in « Storia e Politica », XXI (1982), pp. 438-479, ici p.
439-440, utile comparaison avec ce qui se fait à Florence.
32 Asf, Miscellanea Medicea, c. 647-651.
33 Ivi.
34 Ce panorama n’est évidemment pas exhaustif, il faut noter par exemple en 1736
l’inauguration d’un nouveau Conservatorio di San Giovanni Battista di Bonifazio dont le
but est à nouveau d’enfermer les pauvres. Mais seuls les invalides y trouveront place cf.
L. Cajani, L’assistenza ai poveri nella Toscana settecentesca cit.
Mediterranea - ricerche storiche - Anno XVII - Aprile 2020
ISSN 1824-3010 (stampa) ISSN 1828-230X (online)