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Donner du travail aux pauvres : les logiques laborieuses dans les institutions... 107
celui, limité, qui permet de devenir maître ; celui, plus important, qui
porte à un travail salarié. Le terme qui désigne les jeunes des Innocenti
n’est d’ailleurs ni « disciples » ni « apprentis », mais fattori, enfants à tout
faire, qui se forment sur le tas, en exécutant sans doute les gestes les
plus simples, qu’on leur assigne déjà aux XIII -XIV siècle . Le travail
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hors les murs est beaucoup plus problématique dans tous les esprits
pour les filles que l’on préfère faire travailler à l’intérieur pour éviter les
risques de déshonneur, même si une petite partie est cependant placée à
l’extérieur comme domestiques . Si filles et garçons sont donc différen-
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ciés quant à la possibilité même du travail externe, la finalité de celui-ci
est aussi différente dans l’un et l’autre cas : celui des garçons doit débou-
cher sur la capacité de gagner leur vie une fois atteint l’âge auquel les
institutions cessent de leur prêter secours (autour de 18 ans en géné-
ral ) ; le travail externe des filles, problématique, est lié à la volonté de
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leur constituer une dot qu’elles ne perçoivent qu’à leur sortie de l’établis-
sement, lors de leur mariage ou de leur prise de vœu qui constituent les
deux portes de sortie imaginées pour elles .
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À l’intérieur des murs, le travail est partout, sous des formes va-
riées. Il serait bien entendu nécessaire d’enquêter de manière appro-
fondie sur l’agencement des différentes formes de labeur rappelées,
dans l’introduction générale de ce numéro, au sein des établisse-
ments. Mais le regard sera ici principalement centré sur les manufac-
tures destinées à être vendues à l’extérieur. Étant donnée l’importance
du secteur de la soie à Florence et l’importante masse de main-d’œuvre
peu qualifiée requise par les premières phases de ce travail, on ne
s’étonnera pas de le voir durablement mis en œuvre au sein des insti-
tutions .
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pp. 355-389; M. P. Zanobi, Salariati nel Medioevo (sec. XIII-XV), Nuove Carte, Ferrara,
2009, p. 34 et sgg. pour la « mutation génétique de l’apprentissage ».
38 A. Stella, La révolte des Ciompi : les hommes, les lieux, le travail, Écoles des Hautes
Études en Sciences Sociales, Paris, 1993, p. 116-117.
39 M. Fubini Leuzzi, ‘Dell’allogare le fanciulle degli Innocenti’ : un problema culturale
ed economico, 1577-1652, in P. Prodi (a cura di), Disciplina dell’anima, disciplina del
corpo e disciplina della società tra medievo e età moderna, Annali dell’Istituto storico
italo-germanico, Quarderni 40, (Bologna), 1994, pp. 863-899. Le placement des jeunes
filles abandonnées comme domestiques dans les maisons des citadins aisés est aussi
pratiqué, à partir de 1433, à l’orphelinat S. Gallo qui est ensuite réuni aux Innocenti cf.
L. Passerini, Storia degli stabilimenti di beneficenza cit., p. 668. Seul le refuge de santa
Caterina prévoit l’apprentissage en boutique pour une partie des filles, cf. D. Lombardi,
Poveri cit., p. 168, mais il y a peu d’informations supplémentaires sur ce point.
40 Voir sur ce point N. Terpstra, L’infanzia abbandonata cit., chapitre VI.
41 N. Terpstra, L’infanzia abbandonata cit. ; M. Garbelotti, Per carità, cit., p. 133 et
sgg.
42 P. Malanima, La decadenza di un’economia cittadina cit., p. 84-5 et M. T. Bettarini,
R. Ciapetti, L’Arte della seta a Firenze : un censimento del 1663, « Ricerche storiche »,
Mediterranea - ricerche storiche - Anno XVII - Aprile 2020
ISSN 1824-3010 (stampa) ISSN 1828-230X (online)