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92 Andrea Caracausi, Corine Maitte
institutions sont parfois loin d’être aussi négligeables qu’on l’a souvent
pensé ou affirmé. C’est parfois autour de 30-45 % des recettes qui sont
ainsi générés par le labeur de leurs dépendants (Caracausi, Maitte),
source alors indispensable à leur survie même.
Il est par contre encore plus difficile de mesurer l’impact de l’utilisa-
tion des ressources des différentes formes de labeur proposées par ces
institutions pour les entrepreneurs qui leur achètent produits finis ou
–plus souvent sans doute – semi-finis : il faudrait pour cela pénétrer
dans la comptabilité propre de chacun d’entre eux, ce qui n’a pas été
possible dans le cadre des articles ici présentés. Mais il semble indé-
niable que cela leur a procuré une main-d’œuvre facile, souvent à bon
marché, dont les frais de contrôle ne leur incombent pas : un élément
sans aucun doute non négligeable dans l’économie des coûts, des temps
et de la qualité des produits.
De la même façon, les ressources laborieuses de ces institutions
ont pu constituer des éléments potentiellement importants dans la
flexibilité des économies urbaines, voire dans leur capacité d’adapta-
tion à des produits nouveaux, introduits dans un certain nombre de
cas par l’intermédiaire de ces institutions (Caracausi, Maitte, Rossi).
Certaines d’entre elles bénéficient d’ailleurs directement et en propre
de privilèges leur en attribuant pour un moment au moins l’exclusivité
(Maitte), ce qui permet à la fois d’assurer l’introduction du produit, la
formation de la main-d’œuvre et les ressources de l’institution. Paral-
lèlement, les privilèges reçus par certains entrepreneurs prévoient de
plus en plus, au XVIII siècle spécialement, un véritable cahier des
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charges dans lequel est souvent incluse la formation ou l’utilisation de
la main-d’œuvre locale, spécialement celle d’un certain nombre de ces
institutions : c’est à la fois la garantie d’une pérennité de la profession
dans la région pour l’Etat qui peut donc l’imposer aux privilégiés, mais
aussi celle d’une disponibilité en main-d’œuvre disciplinée et bon mar-
ché pour les entrepreneurs qui parfois la demandent donc. Les uns
comme les autres en espèrent de toute façon une propagation des nou-
veautés, dont le succès n’est pas forcément aussi facile qu’ils ne l’es-
comptent. Ainsi, les frères Carlo et Carlo Rho reçoivent du gouverne-
ment lombard un privilège pour l’introduction des indiennes et de leur
calendrage en Lombardie en 1756. L’État leur verse 80 000 lires et ils
s’engagent à faire battre 200 métiers. Si, en 1766, après la division de
la société entre les deux frères, un seul n’en fait plus battre que sept,
il utilise par contre la main-d’œuvre des institutions charitables pour
alimenter ses métiers en filés . Tous ces exemples semblent montrer
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22 C. A. Vianello (a cura di), Relazioni sull’industria, il commercio e l’agricoltura lom-
bardi del ’700, Giuffrè, Milano, 1941, pp. 39-43.
Mediterranea - ricerche storiche - Anno XVII - Aprile 2020
ISSN 1824-3010 (stampa) ISSN 1828-230X (online)