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Les institutions charitables comme lieux de travail, XVI -XX siecle 95
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présentes, montre l’extrême flexibilité de ces structures productives
au service de quelques marchands-fabricants.
La contribution de Jesús Agua de la Roza s’est focalisée sur la ville
de Madrid au cours du XVIII siècle. Grâce à deux cas d’étude parti-
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culiers (l’Hospicio del Ave María et la Casa de Corrección de San Fer-
nando), l’imbrication entre ces lieux de travail et la politique écono-
mique et sociale plus large de la couronne espagnole à la fin de l’ancien
régime est mise en lumière. Celle-ci vise à une réforme du marché du
travail espagnol afin de dégager la production manufacturière de la
présence des corporations, diminuer les coûts du travail et créer une
main-d’œuvre disciplinée. Outre les thèmes concernant l’organisation
de la division sociale du travail et l’orientation vers le marché de ces
institutions, l’article se concentre sur les conséquences sociales de
cette politique, marquée par le développement de formes de résistance
ouvertes, notamment lors d’un tumulte populaire en 1766.
Roberto Rossi focalise, lui, son attention sur le management de
deux institutions dédiées au gouvernement des pauvres à l’intérieur
de la vaste monarchie ibérique : le Real Albergo dei Poveri de Palerme
et l’Hospicio de Pobres de Mexico, qui peuvent bien sûr être mis en
regard avec les institutions madrilènes étudiées Jesus Agua de la
Roza. Les établissements palermitains et mexicains, tous deux fondés
dans les années 1770 dans le cadre du projet culturel et politique dé-
veloppé par les Bourbon, développent deux manufactures, la soie et le
coton, fortement présentes dans ces deux territoires. L’évolution du
management induit des changements techniques et organisationnels
qui entraînent un plus grand contrôle sur le processus de travail, me-
surant de façon plus efficace la performance et la discipline sur les
lieux du travail.
L’article de Beatrice Zucca, lui, analyse le large éventail d’activités
productives effectuées par les pauvres dans les institutions de charité
turinoises du XVIII siècle. Il se focalise en particulier sur les acteurs
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économiques impliqués dans ce système. Au-delà d’un petit nombre
d’institutions qui enferment les mendiants et les vagabonds, et au-
delà de certaines workhouses qui exploitent les internés pour produire
pour le marché, beaucoup de ces institutions insistent sur le fait que
les pauvres doivent être formés et acquérir des compétences tech-
niques pour entrer le plus tôt possible sur le marché du travail. Bien
qu’avec de grosses différences entre filles et garçons, le séjour dans
ces institutions est une occasion pour les enfants pauvres d’apprendre
un métier et parfois même d’entrer dans une corporation à des condi-
tions favorables. D’un autre côté, ce système crée aussi des avantages
pour les artisans et les entrepreneurs qui, avec l’aval de ces institu-
tions, organisent l’apprentissage et le travail des pauvres : eux et leur
Mediterranea - ricerche storiche - Anno XVII - Aprile 2020
ISSN 1824-3010 (stampa) ISSN 1828-230X (online)